Midnight show {R. trio}

Assise au pied d'un épais séquoia aux racines mortes et aux branches jaunes, Neela surveillait en silence la forêt. Ses petits yeux marrons balayaient la plaine de pins, ses oreilles dressés pour scruter le moindre son. Sa respiration était calme, et lente, le vent sifflait discrètement comme s'il murmurait dans les feuillages épais de la forêt interdite. La lumière de la pleine lune transperçaient les épines des conifères, illuminant de son reflet les moindres cachettes qu'offrait la forêt. Elle avait croisé plus tôt dans la nuit un centaure qui chassait seul, et elle s'était tapis dans l'ombre et il avait passé son chemin sans l'apercevoir. Il faut dire que sous sa forme canidé, peu de personne pouvait la remarquer. Soudain, un bruit de hurlement déchira l'air, un glapissement aiguë d'un loup la fit soudain sursauter. Elle se redressa sur ses pattes avant, et se mit à courir à toute vitesse dans la direction du cris. L'avantage quand vous êtes un vulpes ou "renard", c'est que tout ce que vous détectez avec vos sens est analysé avec rapidité et aussi une incroyable précision. Avec le temps, Neela avait appris à reconnaître le cri d'un loup garou, et surtout le cri de sa meilleure amie Felicia. Chaque soir de pleine lune, les rôles de chacun avaient été réglé comme sur du papier à musique pour éviter tous les problèmes autrefois rencontré lors de ces soirées. Felicia était la seule à échapper à toutes obligations, sa nature l'empêchant de contrôler ou décider quoique ce soit. Neela était l'éclaireur : sa petite taille, sa rapidité et sa vivacité protégeait le groupe en les prévenant d'une menace potentielle. Rose, possédant une forme de prédateur plus vif et plus puissant, protégeait directement Felicia d'elle même, mais aussi des autres. Cette organisation s'était mise en place naturellement après tous les accidents occasionnés dont les filles n'en parlaient plus. Descendant le long de la crête, elle bondit sur les pierres pour rejoindre le cris au loin, puis elle freina d'un coup en apercevant l'ombre de Rose qui patientait tandis que Felicia entamait sa transformation pour redevenir humaine.

...

Neela passa la porte de la salle commune la première en toussotant des restes de terre. Parfois, ses instincts d'animal lui faisait pourchasser des mulots et gratouiller la terre de son museau, ce qui laissait des traces. Elle s'affala à toute vitesse sur le canapé en cuir épais brun. Peu habituée à faire du sport, les escapades nocturnes à chaque pleine lune l'épuisait. Mais pourtant à chaque fois qu'elles rentraient, elles ne pouvaient se décider à aller se coucher et passaient après des heures à parler pour pouvoir permettre notamment à Felicia d'oublier sa soirée. Le feu crépitait vivement dans l'âtre malgré l'heure très avancée de la nuit. Passer par les passages secrets pour regagner le dortoir rallongeaient le parcours, mais il permettait d'être sûre de ne pas se faire attraper par quelques Mangemorts arpentaient l'école toute la nuit à la recherche d'étudiants audacieux qui iraient vagabonder dans l'établissement ou en dehors malgré le couvre feu instaurer par le stricte régime établis par le Seigneur des Ténèbres dans l'école de sorcellerie. Grattant du bout de ses ongles son vernis écailler, elle passa ses jambes sous ses fesses pour se mettre en positions de lotus, et tapota énergiquement sur le canapé pour que ses amies la rejoignent. « Le seul inconvénient d'être un renard c'est cette manie de gratter tout ce que je trouve. Sans rire je crois j'ai déterré trente kilos de châtaignes et ça a juste servi à pourrir mon vernis tout neuf » Elle aurait rêver prendre un bain - privilège offert à son statut de préfète de la maison Gryffondor - mais repartir vagabonder et prendre un bain à bulles si tard aurait alerté Vous-Savez-Qui lui même tellement la tuyauterie faisait du bruit.

Elle bascula sa tête en arrière, ses cheveux pleins de feuilles, et autres détritus que son petit pelage roux avait capturé au passage. Elle les secoua sur les côtés en jetant des regards de petit chiot vers Rose puis Felicia. C'était toujours l'une des fille qui s'occupaient de ses cheveux pour l'unique et simple raison qu'elle adorait les papouilles dans les cheveux et non pas par dégoût. « J'attends bien sûr que l'une d'entre vous s'occupe de ma tignasse pendant que l'autre lance un débat constructif sur les problèmes amoureux de la semaine » Mis à part les bases conversationnelles habituelles et futiles que peuvent avoir trois jeunes sorcières au sein d'une école mixte, les problèmes du trio étaient souvent bien plus grave que ce qu'auraient pu penser des moqueurs. Chacune d'entre elles trimballaient un lourd passé émotionnel entâchés de déboires sentimentaux handicapants à une reconstruction saine de leur vie sociale. Si Neela n'avait jamais rencontré Felicia ou Rose, elle aurait certainement fini au fond d'un ravin, ou engagé comme dame pipi chez Gringotts. Dans tous les cas, elles étaient et resteraient son meilleur soutient et seule famille dans ce monde cruel et sans compassion pour son prochain.

La démarche incertaine et l’esprit encore à moitié embrumé par des pensées animales, Felicia franchit l’entrée de la salle commune des Gryffondor d’un pas claudicant. Un bras passé autour du cou de Neela, elle tâchait tant bien que mal de suivre la chevelure flamboyante de Rose qui ouvrait le chemin. Cette pleine lune n’avait pas été la plus pénible, au contraire, elle avait été relativement calme si l’on ne comptait pas les écorchures superficielles qui maculaient ses avant-bras de sang – qui avait cinquante pourcents de chance de ne pas être le sien. Son visage était intact, ainsi que la majeure partie de son haut du corps, ce qui était un exploit qui aurait mérité d’être célébré, si seulement elle avait été en mesure de s’en rendre compte. La jeune lycanthrope n’avait pas encore récupéré toutes ses facultés ; celle de marcher droit venant juste de lui revenir, la parole suivrait bientôt à en croire le schéma habituel post-transformation. Les années successives étaient parvenues à créer un tableau qui demeurait sensiblement le même à chaque métamorphose ; c’était cette suite d’événements parfaitement orchestrée par ses deux meilleures amies qui rendait la vie de Felicia plus supportable durant ces périodes. Elle savait qu’elles avaient la situation en main et, par conséquent, qu’il ne lui arriverait rien tant qu’elles seraient dans les parages. Elles représentaient l’antithèse de ce qui vivait en elle et s’exprimait à chaque pleine lune, elles étaient le contrôle qu’elle perdait, l’humanité qui apaisait le monstre, ses protectrices attitrées. Voilà pourquoi le premier souvenir qu’elle avait lorsqu’elle redevenait à nouveau humaine était également toujours le même : avant même de chercher à se relever ou à s’habiller, elle les remerciait, d’une voix extrêmement affaiblie mais d’un ton à chaque fois profondément reconnaissant. Elle n’aurait par ailleurs sans doute plus été de ce monde depuis longtemps si elle n’avait pu compter sur leur présence et leur ténacité qui ne connaissait aucune limite.

La chaleur émanant de l’immense cheminée des rouge et or acheva de faire disparaître toute trace de la bête et Felicia retrouva la totalité de ses esprits en à peine quelques secondes. Elle ne jugea pas pour autant préférable de s’asseoir pour le moment, elle tenait à profiter de ses deux jambes après ces longues heures passées à quatre pattes. Pour une fois qu’elles étaient intactes. Ses doigts prirent instinctivement le chemin de ses cheveux à l’instant où Neela mentionna tous les inconvénients que causaient sa transformation et, par extension, le caractère un tantinet imprévisible de son pendant animal. Cette réflexion fit sourire la jeune Burridge. Elle n’avait pas été souvent témoin des agissements de la belle blonde sous sa forme de canidé, cependant elle avait des images bien précises du renard en question ; il représentait parfaitement le côté dévoyé de Purvis, celui qu’elle tâchait de dissimuler dans la vie courante mais qui retrouvait ses lettres de noblesse grâce à l’instinct animal qui surgissait dès lors qu’elle se transformait. A l’inverse, le lynx de Rose, qui avait la réputation d’être la plus extravertie des trois, était l’image même de la pondération et de la sagesse. Si elle savait se montrer violente quand les circonstances l’exigeaient – c'est-à-dire quand le loup garou s’apprêtait à faire du mal ou à s’attaquer à plus fort que lui –, elle faisait la plupart du temps preuve d’une retenue salvatrice. Felicia avait beau n’avoir aucun souvenir de ses actions en tant que bête, elle ressentait en permanence cet aura de calme en présence de la jeune Dearborn. En des termes plus simples, chaque membre du trio avait sa place, chacune complétait l’autre pour former un tout qui pouvait surmonter tous les obstacles. Qu’ils soient physiques ou psychologiques. Justement, après avoir partagé quelques coups, les trois demoiselles allaient maintenant passer à une conversation à cœur ouvert comme elles en avaient l’habitude mais qui n’avait toutefois pas eu lieu depuis un long moment.

Si elle leur vouait une confiance aveugle sur tout et n’importe quoi, Felicia avait toujours fait preuve d’un recul certain lorsqu’il s’agissait de sa vie sentimentale. Elle n’était pas l’être le plus expressif que la Terre ait porté et elle avait toujours ce sentiment de ne pas être aussi intéressante que ses camarades ; après tout, elle n’avait jamais connu que deux garçons dans toute son existence. Cette fois, pourtant, elle avait une foule de choses à raconter à ce sujet, entre sa séparation d’avec Roy et le baiser échangé avec Dustin. Cependant, son courage de Gryffondor lui fit défaut et elle ne se lança pas. Au contraire, elle dépassa la douleur physique causée par ses blessures pour littéralement se jeter sur le coussin adjacent à Neela avant que Rose n’ait le temps de le faire. Avec un sourire faussement désolé en direction de la rouquine, elle croisa ses jambes sous elle et entreprit d’ôter adroitement les innombrables feuilles et autres résidus de végétaux accumulés au cours de la nuit de sa splendide chevelure blonde. Où avait-elle bien pu se fourrer pour revenir dans un état pareil ? Ni Rose, ni elle, n’avait jamais amoncelé autant de saleté en à peine dix heures de forme animale. Sans avoir prononcé le moindre mot, Felicia releva la tête en direction de Dearborn, les sourcils haussés et le regard interrogateur, attendant avec une impatience mal dissimulée qu’elle entreprenne le récit passionnant de sa vie amoureuse.

« On redouble de vigilance. »

Souffla Rose à l’oreille de Neela avant de s’éloigner. Elles en avaient déjà discuté un peu plus tôt mais le répéter permettait à la jeune animagus de se rassurer. Felicia semblait traverser une période houleuse, sans qu’elle n’en ait parlé à ses meilleures amies celles-ci la connaissaient bien assez pour reconnaître les signes. Et qui disait une Felicia à fleur de peau disait un loup encore plus dangereux. Elles étaient peut-être présentes, et désormais bien entraînées, mais elles n’en étaient pas devenues infaillibles. Ces nuits de pleine lune Rose quittait toujours la tour Gryffondor avec une boule au ventre, essayant d’enfouir le plus profondément possible ses peurs et scénarios catastrophes pour se concentrer sur l’essentiel : aider Felicia à traverser cette épreuve.

Un hurlement déchira la nuit et Rose vint croiser une dernière fois le regard de Neela avant de s’enfuir au loin. Elle se déshabilla rapidement et se transforma la seconde suivante pour courir en direction des sons peu rassurants qui envahissait les lieux. Elle retrouva enfin Felicia mais garda ses distances, elle n’allait jamais à la confrontation. Elle n’irait se frotter au loup que si son intervention s’avérait nécessaire. Pour le moment elle restait donc à une distance suffisante pour pouvoir intervenir à n’importe quel moment sans pour autant entrer dans le camp de vision de l’animal sanguinaire que son amie était devenue. Tous ses sens en éveil elle était aux aguets. Même si leur routine était désormais bien huilée, la forêt interdite réservait les pires surprises et elle préférait être prête à affronter n’importe quel imprévu. Rien ne devait être laissé au hasard o l’une d’entre elles pourrait y passer…

Le bras atour de la taille de Felicia, Rose l’aida à grimper les dernières marches qui les menaient à leur salle commune. Toutes trois ressortaient souvent marquées, blessées, par ces nuits houleuses mais pour le moment elles n’avaient eu à compter que des plaies sans gravités et des courbatures vites disparues. La jeune Gryffondor préférait ne même pas imaginer ce qui arriverait le jour où l’une d’elles serait sérieusement amochée et qu’elles devraient fournir une explication à l’infirmière. Elle secoua la tête, inutile de s’embêter avec de telles pensées pour le moment. Elles étaient saines et sauves, n’avaient tué personne en chemin, c’était tout ce qui comptait. Elle sourit en voyant ses deux amies s’évertuer à retirer les feuilles et divers autres débris qui s’étaient accrochés dans leur tignasse et secoua elle-même sa chevelure pour se débarrasser du plus gros, elle s’occuperait du reste plus tard. Elle vint s’asseoir en tailleur près de ses amies, non loin de l’âtre et commençant à jouer avec la bûche embrassé à l’aide du tison.

« Je songe sérieusement à me retirer dans la forêt interdite pour vivre en communion avec les centaures. J'en ai croisé un ce soir, je crois que je lui ai tapé dans l'oeil ! »

Déclara Rose avec humour et malice pour répondre à la proposition de Neela de s’épancher sur ses problèmes sentimentaux du moment. Elle n’avait que peu parler avec ses deux meilleures amies de ce qui se passait entre elle et Declan. Sans doute parce qu’elle-même ne comprenait pas encore très bien ce qu’elle vivait avec son meilleur ami. Les bouleversements s’étaient succédés si rapidement qu’elle ne savait plus trop bien où elle se situait. En plus de ça elle avait conclu un accord tacite avec lui, et elle s’était fait la promesse de ne jamais mentir à Neela et Felicia. Elle dissimulait déjà bien assez de secrets. Elle préférait donc ne pas s’aventurer sur ce terrain là. Et peut-être était-ce également un plaisir égoïste que de garder pour elle les prémices d'une relation dont elle savourait l'évolution sans pour autant en connaître la destination.

Attrapant une couverture rouge et or qui traînait sur un fauteuil elle l’enroula autour de ses épaules encore douloureuses et vint appuyer son dos contre la majestueuse cheminée.

« Mais puisque c’est toi qui aborde le sujet nous aurons le plaisir de t’écouter ! Quel cœur la belle Neela Purvis a-t-elle fait chavirer cette semaine ? Quel élève as-tu charmé d’un simple regard ? »

Elle adressa un grand sourire à la blonde qui devait être l’une des élèves les plus populaires et courtisées de l’école. Rien d’étonnant à cela quand on connaissait la belle.